(Ou comment la vérité s’est fait scalper par Hollywood)
La mythologie, c’est un peu comme une rumeur dans un petit village : à force de passer de bouche en bouche, elle finit complètement défigurée. Et la pop culture n’a pas aidé. Voici trois mythes que les films, séries et autres blockbusters ont joyeusement massacrés.
1. Méduse : la « méchante » qui n’avait rien demandé
Version pop culture : Une créature hideuse, tueuse d’hommes, avec une sale coupe de cheveux et un regard mortel. Littéralement.
La réalité mythologique : Méduse n’était pas une vilaine sorcière maléfique. Elle était une belle mortelle, victime d’un viol par Poséidon dans le temple d’Athéna (oui, on commence fort). En guise de compassion, Athéna la punit en la transformant en monstre. Voilà. Parce que la solidarité féminine, c’est surfait.
Ce qu’on en retient rarement : Méduse devient un monstre par vengeance divine, pas par choix. Elle est une victime, pas une antagoniste. Sa tête tranchée ornera même le bouclier d’Athéna, preuve que le patriarcat, c’est aussi du recyclage.
Roman à lire : « Circé » de Madeline Miller, Méduse n’en est pas la star, mais l’autrice y réhabilite les femmes monstrueuses et oubliées des mythes avec une plume acide et puissante.
2. Hadès et Perséphone : la belle et le kidnappeur ?
Version pop culture : Hadès, le bad boy ténébreux, kidnappe la douce Perséphone pour l’épouser dans son manoir gothique en enfer. Une romance toxique en 3 actes.
La réalité mythologique : Oui, il y a enlèvement. Mais la situation est moins binaire qu’un Disney. Dans certaines versions, Perséphone accepte son rôle de reine des Enfers avec une autorité qu’on n’attendait pas d’une déesse des fleurs. Et puis entre nous, rester six mois sous terre loin des mortels, c’est peut-être un choix de santé mentale.
Ce qu’on oublie souvent : Hadès est un des rares dieux fidèles du panthéon grec. Pas d’aventures, pas de demi-dieux en pagaille. Juste un type un peu morbide qui gère son royaume avec sérieux. Franchement, à côté de Zeus, il passe pour un gendre idéal.
Roman à lire : « Lore Olympus » de Rachel Smythe. Une BD web devenue phénomène, qui revisite le mythe avec une esthétique sublime et une relecture féministe moderne. Hadès y est un gentleman… oui, ça fait bizarre.
3. Pandore : la femme qui a foutu le bazar
Version pop culture : Une cruche ouvre une boîte (ou une jarre, on n’est plus à ça près) et libère tous les maux du monde. Merci Pandore, vraiment.
La réalité mythologique : Pandore a été créée par les dieux pour punir l’humanité après que Prométhée leur a volé le feu. Elle n’avait aucune idée de ce que contenait la jarre. En gros, elle est une bombe piégée livrée par Amazon version Olympus Prime. Et quand elle ouvre la fameuse boîte ? Eh bien elle libère la souffrance, oui… mais aussi l’espoir. Ce détail, bizarrement, on l’évacue souvent. Un peu comme une scène post-générique qu’on aurait zappée.
Ce qu’on devrait se rappeler : Pandore n’est pas coupable, elle est l’instrument d’un plan divin foireux. À ce stade, c’est plus de la tragédie grecque que de la bêtise féminine.
Roman à lire : « The Silence of the Girls » de Pat Barker – Ce n’est pas Pandore, mais Briséis, l’esclave d’Achille, qui prend la parole ici. Même logique : donner une voix à celles qu’on a toujours réduites à une fonction ou une faute.
En conclusion ?
La mythologie antique, c’est un miroir déformant de nos angoisses, nos obsessions et notre fascination pour les dieux sexy et cruels. Mais parfois, il vaut le coup de gratter un peu le vernis hollywoodien pour redécouvrir les vraies tragédies, les vraies injustices… et les vraies héroïnes.
Parce qu’au fond, ce n’est pas Méduse qu’il faut fuir. C’est le scénariste de Percy Jackson.
Article très intéressant et instructif. Petite rectification: Pandore n’a pas libéré l’Espoir qui est le seul élément à être resté dans la boîte après avoir été refermée